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Date importante du
Portugal
La reconquête
Reconquista Même si la reconquête chrétienne des territoires ibériques
aux mains des musulmans débute au viiie siècle, la défaite du calife Abd
al-Rahman III au xe siècle entame réellement le processus de
Reconquista. Les souverains chrétiens des différents royaumes espagnols
s'allient alors et, progressivement, font reculer les Maures. La
Reconquista prend fin en 1492 - année de la découverte d'un nouveau
monde par Christophe Colomb - lorsque les « Rois Catholiques » Isabelle
de Castille et Ferdinand d'Aragon entrent victorieusement dans Grenade.
Dès la fin du Xe siècle, les rois des Asturies participent activement à
la reconquête (voir Reconquista) des régions occupées par les Arabes : à
partir de 1064, Ferdinand Ier le Grand, roi de Castille, puis ses
successeurs, entreprennent de reprendre l'ensemble des territoires du
sud du Douro. Trente ans plus tard, toutes les régions au nord du Tage
sont arrachées aux Maures : pour y parvenir, certains souverains, comme
Alphonse VI le Vaillant, font même appel à des seigneurs étrangers. En
1095, Henri de Bourgogne reçoit de son beau-père Alphonse VI le comté de
Portugal et s'attache dès lors à l'émanciper de la tutelle castillane.
Son fils, Alphonse Ier Henriques, poursuit son œuvre : avec l'appui de
la noblesse, il peut reconquérir les terres reprises par les Maures et
faire reconnaître par la Castille l'indépendance du Portugal en se
faisant couronner roi en 1143. Les règnes de ses successeurs
s'inscrivent dans cette continuité : Alphonse II le Gros (1211-1223)
participe à la bataille décisive de Las Navas de Tolosa (1212) contre
les Maures et permet la tenue des premiers Cortes portugais, assemblée
composée de représentants de la noblesse et du clergé ; Alphonse III le
Boulonnais reprend l'Algarve (1249) et donne au Portugal ses frontières
actuelles ; Denis Ier, fondateur de la première université du pays
(1290), renforce encore le pouvoir royal, favorisant les activités
économiques d'une bourgeoisie urbaine en plein essor.
Le Portugal des Bragance
L'Espagne ne reconnaît l'indépendance du Portugal qu'après une longue
guerre et en échange de la cession de l'enclave de Ceuta (1668).
Entre-temps, Jean IV et ses successeurs ont dû affronter les Hollandais,
qui occupaient leurs possessions dans le nord du Brésil depuis 1624 et
en Afrique depuis 1641 ; ils en sont chassés en 1654 et en 1648. À la
fin du XVIIe siècle, la dynastie royale peut asseoir sa puissance grâce
à l'or et aux diamants brésiliens qui affluent alors à Lisbonne.
En 1703, le traité de Methuen scelle une alliance commerciale avec
l'Angleterre : en contrepartie de l'assurance de vendre facilement ses
vins à Londres — au détriment des vins français — et de l'appui de la
Royal Navy, le Portugal et le Brésil s'ouvrent largement aux produits
manufacturés anglais.
Joseph Ier, peu intéressé par la politique, délègue son pouvoir à un
diplomate, Sebastião Jose de Carvalho e Melo, marquis de Pombal, qui,
inspiré par les principes du despotisme éclairé, œuvre au renforcement
du pouvoir de l'État : réformes fiscales et commerciales, limitation des
pouvoirs de l'Église et expulsion des jésuites (1759). Son règne
(1750-1777) est également marqué par le grand tremblement de terre de
Lisbonne de 1755, dont la reconstruction menée par Pombal est un modèle
d'urbanisme. Le ministre est pourtant congédié par la fille de Joseph
Ier, la reine Marie Ire (1777-1816), farouche adversaire de ses méthodes
autoritaires et de son anticléricalisme ; son œuvre est balayée par le
retour triomphal des nobles et des jésuites. La censure ecclésiastique
est rétablie et le pouvoir confié au tout-puissant ministre de la
Police, Pina Manique.
Le Portugal demeure toutefois l'allié des Britanniques et des coalisés
pendant les guerres napoléoniennes. En novembre 1807, les armées de
Junot envahissent le pays, opposé au blocus continental, et la maison de
Bragance part trouver refuge au Brésil. Pourtant, comme les Espagnols,
les Portugais se révoltent contre les occupants français qui sont
chassés en 1811 grâce à l'intervention des Britanniques. Jean VI préfère
rester au Brésil et confie l'administration du Portugal au duc de
Beresford.
Vers l'Estado novo
António de Oliveira Salazar
Le 28 mai 1926, le général Gomes da Costa soulève la garnison de Braga.
Le coup d'État renverse le régime parlementaire, et le général Carmona,
élu président de 1928 à sa mort en 1951, instaure une dictature. Dès
1928, il choisit pour ministre des Finances António de Oliveira Salazar,
professeur d'économie qui se consacre au rétablissement de l'équilibre
budgétaire avant de devenir président du Conseil en 1932.
Extrait du livre de Salazar:
Salazar, Une révolution dans la paix
Dans Une révolution dans la paix (1937), Salazar brosse le profil d’un
Portugal pacifique, indépendant, devant assumer la révolution de
l’Estado novo (« nouvel État »), plutôt que d’accepter un incommode
engagement sur l’échiquier diplomatique européen (deux ans plus tard, il
choisit en effet la neutralité lorsque débute la Seconde Guerre
mondiale). Sous couvert de cette autonomie portugaiseet prenant in fine
position vis-à-vis du concert des régimes franquiste, mussolinien et
hitlérien, le dictateur tente ensuite de faire croire à un autoritarisme
vital, mais mesuré, qui ne serait pas totalitaire.
ouvrir l'encadré
L'année suivante, une nouvelle Constitution établit un régime
corporatiste reposant sur un parti unique — l'Union nationale (União
nacional) — s'appuyant sur l'armée, l'Église et les grands
propriétaires. L'Estado Novo (« Nouvel État »), paternaliste et
clérical, est proclamé après un plébiscite tenu le 19 mars 1933. Le 23
septembre de la même année, le Statut national du travail dote le pays
d'une structure corporatiste, regroupant les ouvriers dans des syndicats
nationaux, et les patrons dans des grémios (bourses patronales) ; le
droit de grève est supprimé dès 1934. La police politique, la Police
internationale de défense de l’État (PIDE), se charge de neutraliser
toute forme d'opposition au régime, et le Concordat de 1940 renforce
l'influence de l'Église catholique sur la société. Allié naturel du
franquisme, Salazar maintient pourtant la neutralité portugaise pendant
la Seconde Guerre mondiale, et va jusqu'à autoriser le Royaume-Uni et
les États-Unis à utiliser des bases dans les Açores.
Le déclin du régime
Admis dans l'OTAN en 1949, à la faveur de la guerre froide, le Portugal
vit l'après-guerre dans un contexte de troubles économiques et sociaux
suivis, dès le début des années soixante, par les premières aspirations
à l'indépendance des « provinces africaines » : l'Angola (1961), la
Guinée-Bissau (1963), le Mozambique (1964).
L'élection présidentielle de 1958 porte à la présidence de la République
l'amiral Américo Tomás. Face à lui, le général Humberto Delgado réussit
cependant à recueillir 25 p. 100 des suffrages. En juillet 1965,
l'amiral Tomás est réélu dans un climat politique alourdi par des
tentatives de soulèvements (1962) et par l'assassinat de Delgado
(février 1965). En septembre 1968, Salazar, malade, abandonne ses
fonctions de président du Conseil au profit de Marcelo Caetano,
théoricien de l'État corporatiste. Sous des apparences de
démocratisation et d'assouplissement du régime, il poursuit la même
politique que son prédécesseur. Les troubles coloniaux s'aggravent,
entraînant le Portugal dans des conflits interminables et révélant plus
que jamais le blocage d'un régime autoritaire et archaïque.
La révolution des Œillets
Quelque temps après l'arrivée de Caetano au pouvoir, diverses tendances
d'opposition (radicaux, communistes, socialistes) commencent à se faire
entendre au Portugal. Le pays, mis au ban des nations, notamment en
raison de sa politique coloniale, souffre d’un véritable isolement
diplomatique.
Le 25 avril 1974, les militaires
progressistes du Mouvement des forces armées (MFA), lassés de s'enliser
dans une guerre coloniale sans issue, organisent un coup d’État qui
parvient facilement à mettre fin à plus de cinquante ans de dictature.
Le général António de Spínola, ancien gouverneur de Guinée-Bissau et
principal instigateur du coup d'État, porté à la présidence de la junte
militaire, fait expulser Caetano vers le Brésil, libérer les prisonniers
politiques et abolir la censure. Les anciens agents de la PIDE sont
arrêtés et un cessez-le-feu proposé aux nationalistes africains
d'Angola, de Guinée-Bissau et du Mozambique. Cette révolution prend le
nom de révolution des Œillets, allusion aux fleurs que les soldats
reçoivent de la population.
Dans un premier temps, les mouvements de gauche et d'extrême gauche,
dont le Parti communiste d'Álvaro Cunhal, tentent de s'appuyer sur les
militaires les plus à gauche pour mettre en œuvre une politique
socialiste. Ils se heurtent à l'opposition des agriculteurs, des grands
propriétaires terriens et d'une partie de l'armée. Le général de Spínola
démissionne en septembre 1974 et, après une tentative de putsch en mars
1975, se réfugie à son tour au Brésil.
Les premières élections constituantes, en avril 1975, donnent la
majorité aux socialistes, qui recueillent 37,9 p. 100 des voix ; le
Parti communiste obtient 12,5 p. 100 des suffrages. Néanmoins, les
partis de gauche et les militaires progressistes ne parviennent pas à
mobiliser une société traditionaliste, marquée par quarante-six ans de «
silence politique ». En octobre 1975, les secteurs conservateurs de
l'armée reprennent le contrôle des unités militaires les plus à gauche
en démobilisant plusieurs milliers d'hommes. Un mois plus tard, le
Premier ministre, le général Vasco Gonçalves, obtient, après des combats
et la mise en place d'un état de siège, le renvoi du chef de la
sécurité, le commandant Otelo de Carvalho.
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